Mariages reportés, voire annulés, la Covid-19 a mis l’amour à l’épreuve. Pour ceux qui sont parvenus à maintenir la cérémonie, la pandémie a engendré de nouveaux besoins d’organisation.

Samedi 3 octobre, un rassemblement se crée devant la mairie de Rouillac, charmante bourgade coincée au cœur de la Charente. Le marié, Jérémy, arrive le premier comme à l’accoutumé. Très vite mais au compte-goutte, les invités le rejoignent. Une témoin de la mariée s’empresse, elle est chargée de distribuer les masques à tout le monde. Émilie, la reine du jour, les a spécialement  commandés. La veille, elle a bien rappelé à son amie le code couleur : noir pour les hommes, blanc pour les dames. En un quart d’heure, les seize invités se sont réunis. Ils se saluent de loin, d’un hochement de tête, d’un « bonjour » chaleureux ou de larges sourires. Munis de leur accessoire anti-contamination, ils attendent l’arrivée de la mariée. Radieuse et visiblement émue, ses yeux s’humidifient à la vue du monde rassemblé pour elle. Elle attrape son masque blanc et le bras de son futur époux. Ils ouvrent la marche et pénètrent dans l’hôtel de ville avec impatience et appréhension.

Dès le sas d’entrée, passage obligé des mains au gel-hydroalcoolique sous la surveillance du portrait présidentiel. A l’étage, la salle des mariages est agencée selon les recommandations sanitaires, un mètre sépare chaque chaise. Seuls les mariés se retrouvent côte-à-côte. « Les distances sociales étant respectées, et les masques portés par chacun, vous ne voyez pas d’inconvénients à ce que les mariés retirent les leurs ? » demande la maire en préambule. Certains pensent très fort : « Les veinards ! ». Les amoureux peuvent se dire « oui » dans les yeux et s’embrasser sans problèmes d’accessoire médical. Au moment des signatures de l’acte de mariage, le stylo est désinfecté minutieusement entre chaque main. En tout, cinq passages sous la lingette pour le porte-plume, il n’aura jamais été aussi propre. L’écharpe municipale aussi devra passer à la machine après avoir été prêtée au petit Nathan, cinq ans et fils du marié, pour le cliché avec son papa et sa belle-maman. Sa « Mimie » comme il l’appelle.

A la cérémonie solennelle suit la séance photo, sous les voûtes en pierre de l’hôtel de ville. Bien qu’improvisé, le décor un peu pittoresque séduit les mariés. Trois invités, dont le père de Jérémy, armés d’appareils plus au moins performants jouent aux photographes avec plus ou moins de réussite. Par moment, il faut s’y reprendre à plusieurs fois : « tu as oublié de retirer ton masque ! Tout le monde en place on la refait ! » Bras dessus bras dessous sur le parvis de la mairie, les gestes barrières disparaissent peu à peu, l’humeur est à la fête. Mais ils reviennent très vite, sur le chemin du restaurant.

A l’Auberge des Fins Bois, le protocole est strict. Chacun leur tour, ils se rendent aux toilettes pour un lavage complet des mains.  Obligation de porter le masque lors des déplacements. « Ils sont à cheval sur les règles sanitaires, mais c’est en partie pour ça qu’on les a choisis. C’est rassurant dans la période actuelle », avoue Émilie fraîchement mariée. Jérémy ajoute soulagé : « on a eu de la chance que les restaurants ne ferment pas dans la région, en voyant ce qui se passe ailleurs, on a eu peur que ça nous tombe dessus au dernier moment ». La tablée est séparée en deux, pour le respect des distanciations, surtout avec le personnel. Un des mariés trône au centre de chaque table, les invités sont placés de sorte à ce que tout le monde échange, fasse connaissance. Sur le nombre d’invités, Émilie explique : « on ne voulait pas un gros mariage, juste la famille et les amis. Avec le virus on a dû restreindre davantage notre liste. On s’est contenté de la famille proche, de nos témoins et de nos voisins qui sont surtout nos amis ». Ce comité restreint semble satisfaire le couple. « Les connaissant on se doutait que tout le monde s’entendrait bien. C’est préférable quand on passe le week-end ensemble ! », s’amuse Jérémy très décontracté. Le repas, fin et copieux, a régalé les convives. Mais tout le monde a gardé de la place pour la pièce montée, ou est-ce par gourmandise ? Les discussions vont bon train et les rires ponctuent le festin. Après le repas, le mariage se poursuit dans une maison de campagne louée pour le week-end. Loin des espaces publics et des lieux de rencontres, les masques tombent définitivement. « On a passé la journée ensemble, on a fait attention à tout respecter, mais là on est entre nous. On va s’amuser et si on a le Covid au moins on aura profité ! » proclame Élodie, témoin d’Émilie et infirmière. Les invités et les mariés acquiescent. Le ton est donné : le Covid-19 n’aura rien gâché.

Cécile Vassas