La crise sanitaire de la Covid19 n’épargne pas la 27ème campagne de promotion du dépistage organisé du cancer du sein. Lancée le 1er octobre, l’opération destinée à sensibiliser et à soutenir la recherche, fait face à un  problème : les retards pris sur les dépistages, les suivis et les traitements d’une maladie responsable de 12 000 décès par an.

« Les retards dans la prise en charge causeront dans cinq ans une surmortalité allant jusqu’à 5% ». Cette étude réalisée par les chercheurs de l’institut Gustave Roussy paraît effrayante. Ces retards représentent des problématiques importantes quand ils concernent les dépistages. Pendant le confinement, tous les centres ont fermé dans le but de contenir l’épidémie. S’ils sont aujourd’hui de nouveau ouverts, le respect des gestes barrières réduit les rendez-vous. En 2020, le nombre de détections effectué sera considérablement plus faible que l’année dernière : environ 30% de moins. Aujourd’hui encore, la peur de certaines femmes d’attraper le virus ne les incitent pas à passer des examens. Certaines d’entre elles, après un autodiagnostic (souvent possible avec le cancer du sein) préfèrent repousser le dépistage une fois l’épidémie endiguée. Ce report est dangereux. Dans la lutte contre le cancer, chaque mois est décisif.

D’autres femmes, déjà atteintes par la maladie, ont fait le choix de décaler leurs soins. Emilie Groyer, journaliste scientifique à RoseMag, explique ce phénomène par « la peur relayée dans les médias alors même qu’aucune conclusion scientifique claire n’a émergé ». D’un côté, les femmes touchées par le cancer du sein connaissent l’importance d’un suivi régulier du traitement. De l’autre, le climat anxiogène les a incitées à une extrême prudence. En tant que personnes fragiles, certaines patientes ne souhaitent pas prendre le risque de se rendre dans des établissements où plusieurs cas positifs sont présents. Un dilemme s’est installé pour ces malades pourtant conscientes que la gravité de la Covid19 semble faible à côté de celle d’un cancer. Entre la peur de certaines femmes et le report d’opérations médicales considérées comme non urgentes, « c’est 61% des chirurgies qui ont été annulées ». Le constat demeure terrible.

Pour encourager la continuité des traitements, les dépistages et les suivis, l’association Rose’Up a eu recours à la psycho-oncologie. Le but ? Informer les malades et les rassurer. Emilie Groyer, qui travaille également avec l’association, insiste sur cet aspect psychologique : « il y a un besoin de priorisation : quand on a un cancer il faut se focaliser dessus et garder toutes ses forces pour le combattre ».

Habituellement, l’objectif majeur d’Octobre rose est la promotion du dépistage organisé. Cette année, la priorité revient à davantage limiter les retards des prises en charge et des détections. Si certains événements sont organisés (en ligne la plupart du temps) pour attirer l’attention du public sur cette maladie qui touche une femme sur huit, l’urgence est ailleurs : aider les victimes invisibles du coronavirus.

Raphael Hazan