Mardi 2 avril le cinéma aixois Mazarin a organisé une soirée en soutien au Collectif Agir. Pour débattre sur l’accueil des migrants, les deux réalisatrices Shu Aiello et Catherine Catella sont venues présenter leur film « Un Paese di Calabria ».

Dans une salle remplie à l’ambiance tamisée, Un Paese di Calabria remporte l’adhésion du public. Ce film retrace l’histoire de l’accueil chaleureux des migrants par les habitants de Riace entre 2012 et 2016. Le documentaire de Shu Aiello et Catherine Catella était déjà sorti en salle en 2016. Les réalisatrices expriment leur gratitude de voir encore leur film diffusé dans une salle de cinéma.

Pour le duo féminin, ce film représente l’opportunité d’évoquer leurs mémoires personnelles en perspective avec l’actualité. L’hospitalité et l’accueil donnés à ces hommes et femmes, qu’elles refusent personnellement d’appeler migrants, suscitent débat en raison des problématiques actuelles. Elles-mêmes fille et petite-fille d’immigrés, les réalisatrices estiment qu’il était « nécessaire de parler de ces aller-retours comme d’une histoire qui se répète depuis la nuit des temps ». La grand-mère de Shu Aiello a d’ailleurs inspiré une partie du récit. Notamment pour discréditer les discours simplistes sur l’immigration comme un flux, ou une invasion. Elles rappellent qu’en France nous sommes « 70% à avoir un parent d’origine étrangère ».

Le récit du village italien donne un véritable message d’espoir, de tolérance et d’ouverture, nécessaire dans la société actuelle. Mais cet élan de solidarité est stoppé quand les deux femmes donnent des nouvelles de Riace à la suite du tournage du film : une « longue histoire ». Le maire, Domenico Lucano a sur le dos 17 chefs d’accusation, du détournement de fonds jusqu’à la favorisation de l’immigration clandestine. Même si pour la plupart, il a apporté des preuves de son innocence, l’élu reste suspendu de ses fonctions jusqu’au procès dont la date n’a pas été fixée.

Actuellement les demandeurs d’asile ne sont plus présents à Riace car ils ont été déportés. Ils ne restent que les citoyens. Les subventions de l’Europe et de l’Etat ont été coupées. Les réalisatrices décrivent cette situation comme une « catastrophe ». Shu Aiello et Catherine Catella voulaient tourner un autre film là-bas mais le projet a été finalement été annulé en raison de ce « manque de vie ». Le maire de Riace, considéré par ses opposants comme une « bête noire », a créé une association grâce à des fonds privés pour redémarrer les activités (ateliers, enseignements…), en soutien avec des pays comme l’Allemagne ou la Suisse.

Le Collectif Agir essaye, lui, de faire avancer les choses en France. Plus précisément à Aix, dans le pays d’Aix et d’Aigues. Les adhérents reconnaissent tout de même que le projet n’est pas de la même envergure que celui du village italien. L’association se compose uniquement de bénévoles ou d’étudiants. Elle est financée par l’Etat, même s’ils ne s’estiment « pas aidés ». Leur objectif reste le même : apporter un soutien aux demandeurs d’asile dont le statut est en attente d’évolution.

Les membres organisent des soirées dans Aix : « les moments d’agir ». La diffusion du film Un Paese di Calabria en fait partie. Par une séance cinéma suivie d’un débat, les adhérents souhaitent sensibiliser à l’accueil des migrants. Les bénévoles désirent aussi démontrer que les informations à ce sujet restent encore souvent fausses. Actuellement 80 demandeurs d’asile, de 31 nationalités, se trouvent dans la ville d’Aix où ils sont logés et accompagnés en matière d’enseignement et de santé.

« Le Collectif Agir a besoin de vous », lancent comme un cri d’alarme les volontaires. Né en 2015, à la suite de la diffusion de la photo d’un enfant migrant mort sur la plage, les Aixois ont estimé qu’ils ne pouvaient pas rester sans rien faire. Les représentants travaillent avec d’autres associations, comme Emmaüs, mais aujourd’hui les bénévoles sont débordés par la tâche.

La « petite subvention » accordée récemment par la mairie d’Aix a été bénéfique mais insuffisante. Les courageux membres demandent des moyens supplémentaires, de l’argent, mais surtout des forces de la part des habitants aixois. Le collectif, reconnu d’utilité public, demeure « malheureusement connu » en raison du monde qui vient frapper à la porte. Le créateur craint « que ça dure ». L’association demande alors aux Aixois, « aider Agir, pour aider les demandeurs d’asile ».

(https://collectifagir.com)

Marie Lagache