Seul étendard blanc dans la foule, Clara porte haut les couleurs de l’UNL et la parole des lycéens au mégaphone, contre la loi travail El Khomri. « Je veux prouver que les lycéens sont concernés et les jeunes en formation mobilisés pour leur avenir » scande-t-elle à la centaine d’étudiants présents. Du haut de ses dix-sept ans, elle a réussi à mobiliser à elle seule les élèves du lycée Vauvenargues, en prévision du rassemblement de ce matin, au Parc Jourdan. A première vue, on croit avoir affaire à une adolescente comme les autres. Sac à dos, baskets dernier cri et chino kaki; seuls sa sacoche en toile et son drapeau tamponnés du sigle de l’UNL semblent trahissent son engagement. Clara contraste avec la majorité des étudiants interrogés jusque-là, plus ou moins informés sur la raison de leur présence.

Une lycéenne militante qui sort du lot

En effet, c’est un discours rodé et construit qu’elle nous assène contre la loi El Khomri. « Je me bats tous les jours pour informer les lycéens sur ce qui se passe ». Méfiante, elle reproche notamment à la loi « d’utiliser des termes compliqués pour nous embrouiller ». Clara donne l’impression, à l’entendre, d’avoir dix ans de plus. Elle est persuadée que le mouvement contre la réforme du travail prendra, comme pour le CPE proposé par Dominique de Villepin – elle n’avait que sept ans à l’époque. Les seules directives qu’elle a reçues de la part du syndicat étudiant, c’est ce mot d’ordre : le retrait du projet. Le regard bleu acier perçant, elle n’en est pas à sa première manifestation. Passant d’un groupe de lycéens à un autre, portable à la main, le pas assuré, la jeune-fille semble être dans son élément. Les manifestations, ça la connaît. Elle l’a fait il y a un an (ndlr, Loi Macron) ainsi que la semaine dernière déjà. « Et je continuerai! » Pour elle c’est un défi de marcher dans les rues d’Aix car c’est « dans les villes où la mentalité est différente qu’il faut se battre, qu’il y a le plus de choses à faire ». Devant les journalistes, elle sait comment s’y prendre : « J’ai été interviewée par le journal télévisé de France 3 au début de la semaine ».

Figure d’un engagement jeune mais apolitique

Clara fait partie de cette nouvelle génération de militants sans modèle politique particulier, « entrer dans un parti politique me faisait un peu peur ». Ses parents ne lui ont pas transmis la fibre du militantisme. « Je ne sais pas s’ils approuvent ou non cette loi, ils n’ont pas les mêmes opinions que moi » ajoute la petite blonde, qui vit en internat. Son engagement ? « Un coup du hasard » se souvient-elle. Après avoir été « collée pour avoir jeté une simple orange » au lycée, la CPE de l’époque lui propose de remplir un formulaire pour entrer au Conseil de la Vie Lycéenne. Tout s’enchaîne ensuite très vite : elle est élue au CVL du Lycée Vauvenargues puis au CAVL. Repérée par un cadre de l’UNL, après un coup de téléphone et un café, elle intègre l’équipe nationale de l’organisation – « pour et par les étudiants » – un discours qui lui a tout de suite plu.

Le prochain rassemblement contre la réforme du travail est programmé pour le 31 mars prochain. A la voir au lancement du cortège, à dix heures, défilant déterminée en première ligne, on comprend que Clara n’est pas prête d’abaisser son étendard blanc.

Anna Kaiava