Après avoir mis en place un comité anti-corruption, Mohammed Ben Salmane, a frappé fort le week-end dernier. Quatre ministres, onze princes, et 38 anciens ministres et hommes d’affaires ont été arrêtés. Le nouveau prince héritier semble vouloir imposer son style. Au nom de la modernité et pour, sans doute, asseoir son pouvoir.

En l’espace de deux ans, Mohammed Ben Salmane est devenu très populaire en Arabie saoudite. Selon Stéphane Lacroix, professeur associé à l’École d’Affaires internationales de Sciences-Po (PSIA), “il était inconnu en avril 2015, pour les observateurs étrangers comme pour les Saoudiens. Et puis, en conduisant la guerre au Yémen, il est brusquement apparu à la Une de tous les journaux”.

Le 21 juin 2017, il est nommé prince héritier par le roi Salmane pour remplacer son cousin Mohammed Ben Nayef. Depuis, Ben Salmane multiplie les coups d’éclats. En septembre dernier, le prince a par exemple ordonné un décret royal autorisant le permis de conduire aux femmes. Dans ce royaume du Golfe, les changements sociaux ont du mal à passer, car l’opposition des ultraconservateurs est encore franche. 

Si Ben Salmane apparaît comme un partisan de la modernité, cet argument lui est essentiel pour affronter ses adversaires politiques. La purge du week-end dernier est aussi un moyen d’envoyer un message aux puissants du royaume. Selon Kristian Ulrichsen, spécialiste du Golfe aux Etats-Unis, “l’étendue et l’ampleur de ces arrestations semblent être sans précédent dans l’histoire moderne de l’Arabie saoudite”.

L’Arabie saoudite doit se réformer pour subsister

Au vu de la situation économique du pays, ces réformes ne semblent-elles pas indispensables ? A l’heure actuelle, le pays tire le principal de ses revenus dans le pétrole. Mais face à la disparition prochaine de “l’or noir”, l’Arabie Saoudite doit se diversifier. Fin octobre, Ben Salmane a annoncé un projet démentiel pour son pays avec la création d’une future mégalopole futuriste. Selon le Parisien, “le pays lancera en 2018 la construction d’une gigantesque cité de divertissements grâce à des investissements locaux et étrangers […] Considérée comme unique en son genre dans le monde, elle aura une superficie de 334 km², soit environ trois fois celle de Paris”.

Ce programme a pour but de faire entrer l’Arabie Saoudite dans une nouvelle ère, et risque de chambouler cette monarchie dynastique. Car en plus des réformes économiques, Ben Salmane a annoncé publiquement sa volonté d’avoir « un Islam ouvert sur le monde et toutes les autres religions ». Le prince héritier souhaite également mettre fin à l’extrémisme religieux. “Nous n’allons pas passer 30 ans de plus de notre vie à nous accommoder d’idées extrémistes et nous allons les détruire maintenant“ a t-il déclaré fin octobre.

Dans un pays où la pluralité des religions est interdite et les droits de l’Homme bafoués, les réformes de Ben Salmane doivent être considérées par les partisans de la démocratie.

Jordan PIOL-SPERANZA