Salle comble mardi soir au Cézanne pour l’avant-première d’« Adieu les cons ! » d’Albert Dupontel. Sa sortie est prévue le 21 octobre prochain. Les nouvelles mesures, imposées en raison de la recrudescence épidémique dans la métropole d’Aix-Marseille, ont contraint de nombreux espaces de vie à baisser le rideau. Mais les cinémas aixois, quant-à-eux, sont épargnés, pour le plus grand bonheur du public. Le cinéma reste un des derniers lieux de partage, de retrouvailles et de discussions.

Les rues se vident à Aix-en-Provence en cette soirée du mardi 29 septembre. A l’entrée du cinéma, les spectateurs s’impatientent, le billet préalablement acheté à la main. Depuis leur réouverture en juin, les cinémas aixois demandent d’acheter, si possible, les places par Internet et de privilégier le paiement en ligne. Mais impossible, dans tous les cas, d’avoir une place si on ne l’a pas réservée auparavant. Les deux séances prévues à 20h et 20h45 sont complètes. Tous les groupes se trouvent à un mètre de distance les uns des autres et l’on discute cinéma avec entrain. On parle plus particulièrement des films décalés et loufoques de Dupontel. Une fois le billet scanné, les clients utilisent une noisette de gel hydroalcoolique. Les spectateurs se dirigent ensuite vers la salle obscure, impatients et animés par la même curiosité. Les sens d’entrée et de sortie sont clairement indiqués au sol et l’on suit les flèches, comme déjà plongés dans un monde magique et ludique. Un siège vide sépare chaque groupe, mais les bavardages font de cette multiplicité d’êtres une seule et unique entité. Le réalisateur et acteur Albert Dupontel arrive enfin pour présenter le film, sous un tonnerre d’applaudissements. On en oublierait presque que la salle n’est complète qu’à hauteur de 65% de sa capacité. Dupontel remercie chaleureusement le public de sa présence, malgré la situation sanitaire. « Par les temps qui courent c’est quasiment un acte héroïque ! » déclare-t-il. Avant l’extinction complète des lumières, le personnel vérifie une dernière fois que le port du masque est respecté par tous les spectateurs; l’obligation est également rappelée sur l’écran.

La salle est désormais plongée dans le noir. Le public pénètre un monde inconnu et libérateur, le temps d’une heure et demie. Les masques en tissu coloré recouvrent les visages, mais l’on peut toujours entendre les rires et deviner des sourires. L’hypnose n’épargne aucun spectateur. Les corps se détendent et s’animent, réagissent à l’unisson. Les spectateurs ont toujours plaisir à aller au cinéma, peut-être encore davantage en temps d’épidémie. Il leur permet de se déconnecter du monde extérieur, de s’abandonner et se ressourcer. « Le cinéma est une parenthèse magique. Aller voir un film peut être particulièrement bénéfique. C’est un moment où l’on se coupe du monde réel, ce qui fait du bien, vu la situation actuelle » confie Lucas, un étudiant aux yeux encore illuminés. « C’est un lieu social où l’on est face à un véritable spectacle tous ensemble, où l’on peut observer les réactions des uns et des autres. Pour Dupontel aussi, il doit être agréable de retrouver le contact avec son public. C’était très enrichissant de rencontrer un réalisateur que l’on apprécie et surtout d’écouter toutes les choses qu’il a à nous raconter sur son film. »

Mais les salles de cinéma, en dehors de ces événements importants, peinent à se remplir. « En temps normal, nous aurions vendu la totalité des places, sans le moindre doute, pour cette avant-première. Nous n’aurions pas pu proposer une seule séance en raison de la forte demande » nous informe un membre du personnel. « Ça fait très plaisir de voir que les gens sont intéressés par ces présentations. Hélas, la sortie de nombreux films, notamment américains, a dû être repoussée, donc la fréquentation du cinéma reste faible. Les gens ne fréquentent pas davantage les cinémas depuis que les bars et restaurants sont fermés. Au contraire, avant les gens allaient parfois au restaurant puis clôturaient leur soirée avec un cinéma ! ». Une fois sorti du cinéma, la rue sans vie donne déjà envie de retourner dans la salle chaude et confortable.

Elisa Hemery