Depuis 1901, le prix Nobel est décerné chaque année en octobre à ceux qui ont le plus bénéficié à l’humanité par leurs œuvres, leurs découvertes ou leurs inventions. Parmi eux le prix Nobel de la paix, emblématique, récompense « la personnalité ou la communauté ayant le mieux contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou à la réduction des armées permanentes, à la réunion et à la propagation des progrès pour la paix ».

Cette année a une résonance particulière. Le Prix Nobel de la paix est décerné à la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires. Une situation plutôt exceptionnelle, cette distinction étant rarement accordée à une personne morale, et encore moins à un groupement de plusieurs ONG. Elle se justifie cependant par le contexte international, le comité tenant, en ce 6 octobre, à récompenser leurs efforts. L’année 2017 a en effet été particulièrement marquée par les tensions internationales à ce sujet en Corée du Nord et en Iran. Malgré une objectivité promise par le comité, sa décision reste très ancrée dans le contexte politique actuel, à l’heure des essais nucléaires et des menaces d’utilisation de l’arme atomique par certains dirigeants.

Une mise en question de la subjectivité, voire de la légitimité du prix Nobel

Si la lutte contre les armes de destruction massive est indéniablement une œuvre primordiale pour le maintien de la paix, d’autres lauréats ont pu faire polémique. En 1906, Théodore Roosevelt obtient cette récompense pour son action en faveur de la fin de la guerre entre la Russie et le Japon. Pourtant, en dehors de la portée idéologique de ce choix, ce dernier n’a pas toujours été un grand défenseur de la paix. Il est notamment l’auteur de la doctrine du « Big stick », associant la force militaire au processus de négociation diplomatique. Plus récemment, c’est la birmane Aung San Suu Kyi qui a fait l’objet de fortes contestations. Lauréate en 1991, son silence a fait parler d’elle lors du massacre des Rohingyas. Cette actualité remet en question la légitimité de son action en faveur de la paix, et par extension, de son prix.

Un créateur lui-même fortement controversé

Il est paradoxal d’attribuer la paternité du prix Nobel de la paix et de la dynamite au même homme. Durant la majorité de sa vie, Alfred Nobel ne s’est en effet pas distingué par son ambition pacifiste. Outre ses inventions, il est également propriétaire de la compagnie d’armement Bofors. L’attribution du prix, cette année, à une organisation de lutte contre l’armement, atteste malgré tout de la réussite de son œuvre. Plus de cent ans plus tard, le « marchand de mort » aura finalement contribué à œuvrer pour la paix.

Marie GENDRA et Maud GUILBEAULT