Après l’effondrement de deux immeubles rue d’Aubagne, la question longtemps mise sous le tapis de l’insalubrité des logements refait surface. Mais comment la situation a-t-elle-pu atteindre un tel niveau de pourrissement dans le centre-ville ? 

Après avoir pleuré leurs morts, les Marseillais cherchent désormais des responsables. Le 16 novembre dernier, 8000 personnes battaient le pavé lors d’une « Marche de la colère » organisée par différentes associations marseillaise. Un mot d’ordre parmi les manifestants : montrer aux autorités municipales que le statuquo ne pouvait plus durer dans la cité phocéenne. Après l’effondrement de deux immeubles dans le quartier de Noailles, causant la mort de 8 personnes, la mairie de Marseille semble avoir pris la mesure de la contestation. Elle a déjà évacué plus de 200 logements, et plus de 1000 personnes ont été relogées.

Mais nombreux sont les acteurs de la vie locale marseillaise à penser que les services municipaux ne vont pas assez loin, et ne font pas tout pour enrayer le phénomène. Ainsi, la semaine suivant le drame, le quotidien La Marseillaise a lancé « Balance ton taudis ». Une opération permettant aux habitants de la ville de localiser sur une carte les bâtiments insalubres encore loués. Résultat, les témoignages affluent, et pointent le plus souvent des bâtiments situés dans les quartiers les plus pauvres, à Noailles ou au milieu de la Belle de mai par exemple. Ces immeubles insalubres sont pour la plupart la propriété de bailleurs privés, qui profitent du peu de contrôle organisé par la mairie pour reporter les travaux indispensables. De plus, les populations vivant dans ces taudis sont souvent très pauvres, ce qui les rend captifs de leurs logements. Ils ne peuvent pas fournir les papiers nécessaires pour louer d’autres biens.

La catastrophe de Noailles a également été l’occasion de critiquer la politique municipale en matière d’aménagement du territoire. Dans son livre « La fabrique du monstre », publié en 2016, le journaliste Phillipe Pujol attaque frontalement l’administration de Jean-Claude Gaudin. Il l’accuse notamment de brader le parc immobilier marseillais à des promoteurs privés qui n’ont ni les fonds ni l’envie de faire de l’entretenir. D’un autre côté, la mairie arrose d’autres quartiers de fonds et de programme de rénovation, comme le Panier, en raison de leur potentiel touristique important. Le journalisme raconte donc en quelque sorte comment une ville à deux vitesses est en train de se créer, où les plus pauvres peuplent des taudis relégués au second plan, tandis que les quartiers les plus touristiques agissent comme des vitrines.

Le 29 novembre, Martine Vassal, la présidente de la métropole Aix-Marseille, a annoncé un plan de 600 millions d’euros visant à résorber l’habitat insalubre dans la région. Parmi les mesures annoncées, l’expropriation des immeubles les plus délabrés. Pas sûr que cela suffise à calmer la colère des Marseillais.

Simon Adolf