Changement de stratégie pour Facebook. Le fondateur du réseau social aux quelques 2 milliards d’utilisateurs a annoncé vouloir privilégier les contenus publiés par les  «  amis  », au détriment de ceux des médias et annonceurs. Une annonce qui n’est pas sans conséquence, à l’heure où les réseaux sociaux occupent une part croissante de la sphère médiatique.

«Ce que Facebook fait de plus important: aider à nous connecter les uns les autres» déclarait Marc Zuckerberg en décembre dernier. Si les interactions entre les utilisateurs constituent la raison d’être du site, force est de constater que le contenu du fil d’actualité diffère de l’origine. Les vidéos et articles viraux pullulent, l’information circule à une vitesse qui ne cesse de croitre. Or, le fondateur de la plateforme ne voit pas cela d’un très bon œil. «  Lorsqu’on utilise les réseaux sociaux pour se connecter aux gens auxquels on tient, cela accroît notre bien-être. A l’inverse, lire passivement des articles ou regarder des vidéos, même s’ils sont informatifs ou distrayants, n’est pas aussi bénéfique», expliquait-t-il le 12 janvier 2018 dans un message publié sur son compte. Partant d’une telle philosophie, c’est à dessein qu’il souhaite remédier à cela. Les salariés de Facebook vont donc être invités, par le biais d’algorithmes savants, à sélectionner d’autres contenus jugés plus pertinents pour les utilisateurs. Sélectionner donc, et mettre l’information publiée par les médias sur la touche.

Un parti pris contestable.

Pourtant, nombreux sont ceux qui voyaient dans les réseaux sociaux une opportunité. Voire l’avenir de la profession. Selon une étude publiée le 15 juin 2016 par l’institut Reuters d’étude du journalisme (université d’Oxford), 51% des sondés utilisent les réseaux sociaux pour suivre l’actualité. Pour 28% des 18-24 ans, il s’agit même de la première source d’information. Forts de ce constat, de nombreux professionnels ont fait le choix du pure player*. Des sites tels que Konbini ou encore Vice font des réseaux sociaux leur domaine de prédilection. Mais ce sont également les médias traditionnels, comme la presse papier, qui ont emboîté le pas. Salomé Moisson, qui a occupé un poste de community manager lors de son stage au sein du quotidien La Provence, le confirme. « 30% des visites sur laprovence.com proviennent des réseaux sociaux. Il y a un lien fort entre les provençonautes et le média. En plus de constituer une part importante de l’audience, ils contribuent à l’information ; proposent des sujets, envoient des photographies ou vidéos  ». Or Facebook ne souhaite plus mettre en avant les publications des médias. Et cela ne permettra probablement pas d’endiguer le problème des fake-news, « fléau » qui semble inquiéter de plus en plus les pouvoirs publics. Emmanuel Macron, lors de ses vœux à la presse le 3 janvier dernier, annonçait  qu’un texte de loi serait déposé prochainement. En période électorale, certaines plateformes pourraient être bloquées. Pourtant, Facebook se défend de fermer les yeux sur ce type de contenus : 30 000 comptes français diffusant de fausses informations ont été supprimés durant la campagne pour les élections présidentielles et législatives. Mais en privilégiant le relais des publications des « proches », le réseau social ne va pas dans le sens d’une meilleure fiabilité des sources.

*Pure player : peut-être traduit par «tout en ligne».

Thémïs LAPORTE